La valeur des vertus
ou “deviens qui tu es quand tu l’auras appris” – Pindare
Que sont les valeurs ?
De nombreux philosophes, psychologues comportementalistes et même coachs en management se sont posé la question : « Qu’est-ce que les valeurs ? »
Pour tous pratiquement, les valeurs permettent de répondre à la question : « Pourquoi agissons-nous comme nous agissons ? » Elles peuvent donc nous aider à comprendre ce qui est le plus important pour nous, en tant qu’individus ou groupes, à travers différents contextes et situations sociales.
Aussi, les valeurs peuvent être vues comme des guides de vie, des motivations trans-situationnelles, organisées de manière hiérarchique. Bien que non directement observables, nos perceptions, nos attitudes, nos choix, nos comportements, nos jugements et, par-dessus tout, nos actions les manifestent.
Une autre notion, pas si différente, la vertu
Qu’est-ce qu’une vertu ? Est-elle différente d’une valeur ?
Selon les philosophes, l’éthique de la vertu se penche sur les qualités d’une personne, qui influent sur les décisions et les actions de celle-ci, dans la perspective de la réalisation de soi.
En quelque sorte, une vertu est donc une valeur qui pousse à être le meilleur et le plus droit possible.
Si nous rapprochons notre définition de « valeur » avec cette définition de « vertu », nous constatons que la principale différence réside en la « neutralité » des valeurs du point de vue éthique. Par exemple, « dialogue », « sécurité » ou « productivité » sont neutres sur le plan de la morale ; « altruisme » ou « courage » seraient perçus comme positifs par les Grecs, donc comme des vertus.
Les anciens philosophes grecs et, plus particulièrement, Socrate et Platon définissaient la vertu comme la capacité d’adopter dans sa vie quotidienne un certain nombre de principes et de valeurs dont la pratique permet de mener une vie morale, c’est-à-dire d’agir en conformité avec ce que l’on pense.
C’est à partir de cette pensée qu’Aristote a pu définir son éthique, tournée vers la recherche du Bien.
Il s’agit d’un savoir pratique composé de cinq qualités, orientées en croix à la façon des quatre points cardinaux, autour d’un centre occupé par la sagesse : le courage, la tempérance ou la modération, la justice ou la probité, la piété ou la dévotion.
Très marquée par les notions de mesure et de sagesse, la vertu aristotélicienne est présentée comme un juste milieu entre deux défauts : un manque et un excès. Par exemple, le courage se trouvant entre la lâcheté et la témérité.
Une personne intempérante ne suit pas la raison, mais les émotions. Or, la vertu morale est une voie moyenne entre deux vices, l’un par excès et l’autre par défaut : « C’est tout un travail que d’être vertueux. En toute chose, en effet, on a peine à trouver le moyen. »
La vertu ne peut pas être simple bonne intention, elle doit être aussi action et réalisation. Elle dépend du caractère (ethos) et de l’habitude de bien faire que les individus doivent acquérir. Les vertus sont en nous seulement à l’état de puissance mais nous naissons tous avec la potentialité de devenir moralement vertueux. « C’est en pratiquant les actions justes que nous devenons justes, les actions modérées que nous devenons modérés, et les actions courageuses que nous devenons courageux. »
Mener une mauvaise vie équivaut à se laisser dominer par des forces psychologiques irrationnelles vous entraînant vers des buts extérieurs à vous-mêmes, des comportements et des actions avec lesquels on ne se sent pas en accord… Aristote, comme Platon avant lui, estimait l’harmonie intérieure comme absolument nécessaire pour vivre une vie bonne, alignée avec ses principes et croyances.
Dans ce sens, les vertus aristotéliciennes peuvent donc être considérées comme des valeurs morales.
Nous ne pouvons pas clore cette présentation sur le thème des valeurs et des vertus sans mentionner le modèle de Christopher Peterson et Martin E. P. Seligman, devenu un classique de la psychologie positive.
Ces psychologues ont identifié 24 « forces de caractère », largement reconnues et valorisées « de façon consistante à travers l’histoire et les cultures ».
Les forces de caractère, aussi appelées « valeurs en action », sont des capacités de se comporter, de penser ou de ressentir de manière qui favorise un fonctionnement et des performances optimales et aide à mener une vie heureuse et florissante.
Elles sont différentes d’autres types de forces tels que les compétences, les talents, les intérêts ou les ressources.
Une caractéristique de ces forces est qu’elles peuvent être cultivées et pratiquées.
Dans ce sens, elles sont proches de l’éthique aristotélicienne.
Irène Papaligouras-Bataille